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Non-respect du formalisme du mandat de l’agent immobilier : protection du seul mandant

Cass. Mixte : 24.2.17
15-20411

Le locataire, tiers au mandat conclu entre le bailleur et l’agent immobilier et destinataire d’un congé pour vente peut-il se prévaloir du non-respect des prescriptions formelles de la loi du 2 janvier 1970 dite loi Hoguet et de son décret d’application dans le mandat pour demander l’annulation de son congé ?

L’arrêt rendu par la chambre mixte de la Cour de la cassation répond à cette question en retenant une solution inverse à celle retenue jusqu’alors.

Jusqu’alors, une jurisprudence constante et concordante des première et troisième chambres civiles considérait qu’il résultait des articles 1er et 6 de la loi du 2 janvier 1970 que les conventions conclues avec les professionnels relevant de la loi Hoguet devaient respecter les conditions de forme prescrites par l’article 72 du décret du 20 juillet 1972 à peine de nullité absolue qui pouvait être invoquée par toute partie y ayant intérêt (Cass.Civ I : 25 février 2003 ; Cass. Civ III : 8.4.09). Ainsi, dans le cadre d’un congé pour vente, le locataire pouvait soulever les irrégularités d’un mandat non limité dans le temps, non mentionné dans le registre des mandats pour faire annuler le congé pour vente.

La solution reposait sur l’idée que "la loi Hoguet qui avait pour vocation de réglementer et d’assainir la profession d’agent immobilier et de protéger les clients de ces professionnels relevait de l’ordre public de direction et de l’ordre public de protection. La primauté de l’ordre public de direction sur l’ordre de protection conduisait à la nullité absolue des mandats conclus en violation des dispositions assurant la protection de ces impératifs" (cf. note explicative de la décision).

Dans l’arrêt du 24 février 2017, la méconnaissance des règles formelles (loi du 2.1.70 : art. 7 et décret du 20.6.72 : art.72) est désormais sanctionnée par une nullité relative. En conséquence, le locataire, tiers au mandat, n’a pas qualité pour se prévaloir des irrégularités de forme affectant le mandat.
Appliquant une nouvelle méthode de rédaction des arrêts qui se veut plus explicative notamment pour les revirements de jurisprudence (cf. Rapport de "conclusions d’étapes" de la Cour de cassation), la Cour de cassation détaille les motivations de la nouvelle solution. Elle diffuse également une note explicative de sa décision.

Pour la Cour de cassation, "l’évolution du droit des obligations résultant de l’ordonnance du 10 février 2016 conduit la chambre mixte à apprécier différemment l’objectif poursuivi par le législateur à travers les dispositions de la loi Hoguet, en cernant, précisément, celui de chaque disposition légale". Cette nouvelle appréciation l’amène à décider que les prescriptions formelles de cette loi, dont la violation était alléguée par la locataire, visent la seule protection du mandant dans ses rapports avec le mandataire.

Elle retient que le loi ALUR et la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, instituent de nouveaux mécanismes de régulation de la profession d’agent immobilier qui conduisent la chambre mixte à considérer que l’ordre public de direction n’a plus à être assuré par les parties au procès.

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